La transidentité n’est pas une question de chance, c’est une question de choix

crossdress Deux personnes transgenres papotent de leur sort. L’une a décidé de mordre à pleine dent sa transidentité tandis que, pour l’autre, il est plus difficile de s’épanouir. « Tu as beaucoup de chance » confie cette dernière, sans doute sincère mais aussi très naïve. Ce dont elle ne se doute pas, et ce que beaucoup de personnes ne savent pas, c’est que la transidentité n’est qu’une question de choix. La chance n’a pas beaucoup de place dans un parcours « T » sauf quand on fait le choix de la provoquer.

♫ Pourquoi

Il y a un choix que l’on ne fait pas et c’est pratiquement le seul : celui de naître transgenre. Ça pourrait être pire, sachez-le, mais il n’empêche qu’un « T » qui se découvre se posera l’impérissable question, comme Sandy Valentino en son temps : pourquoi ? Ça tombe sur vous, ça tombe sur moi, arbitrairement, sans que l’on ne puisse protester. À la révolte succède le fatalisme : c’est comme ça, on n’a pas le choix, la vie est tout simplement un mauvais quart d’heure. D’une manière ou d’une autre, il faudra vivre avec. Tout le reste nous appartient : choisira-t-on de subir sa transidentité ou, au contraire, s’en servira-t-on pour s’épanouir ? Vivra-t-on pour faire plaisir aux autres ou pour être soi-même ? Favorisera-t-on une bonne image de soi ou le bien-être intérieur ? La vie de « T » se ponctue de ces choix. crossdress

Bulbasaur! I choose you!

La plupart de ces dilemmes, c’est parfois difficile de l’admettre, naissent des barrières psychologiques que nous avons en nous. Pour des actions ou des gestes simples, on n’arrive pas à se résoudre à prendre un choix :
  • Vais-je ou non franchir le pas de ma porte « en femme » ?
  • Vais-je ou non demander conseil à une vendeuse de maquillage ?
  • Vais-je ou non publier des images de mon visage féminin sur Internet ?
  • Vais-je ou non me travestir aujourd’hui ?
Au-delà de ces palissades imaginaires, il existe tout un tas de bonnes raisons de ne pas faire un choix : « ma femme ne sait pas », « je ne voudrais pas que mon entourage professionnel soit au courant », « que va-t-on penser de moi ». Il n’est pas rare d’entendre ou de lire ces choix puisque, oui, au final, ce sont des choix.

Le choix vous appartient

On peut prétendre autant que l’on veut « ne pas avoir le choix », ce n’est jamais entièrement vrai. Tous ces choix n’appartiennent qu’à nous. Si on préfère embrasser une carrière florissante au détriment de son intégrité, ce n’est que l’une des options qu’offre la vie. Et croyez-le, ce n’est pas toujours la plus raisonnable. On peut aussi choisir de ne pas parler de sa transidentité, de ne pas s’écouter soi-même et de s’en remettre à la chance ; en l’occurrence, à la malchance. Après tout, c’est souvent ce qu’il se passe, quand on pense que les autres ont plus de chance. C’est possible, c’est parfois vrai, mais pour le savoir, il faut la provoquer. C’est une chance d’être accepté par les siens, encore faut-il choisir de faire ses coming out pour s’en rendre compte. C’est une chance de vivre « en femme » comme on veut, quand on veut. Encore faut-il faire le choix de s’en donner les moyens. crossdress

Choisir de ne pas choisir

Bien sûr, rien n’oblige à faire ces choix. Sinon, on n’aurait (justement) plus le choix… Cela dit, « choisir » de vivre sa transidentité, au grand jour, au nez et à la barbe de tous, a aussi des vertus militantes insoupçonnées. Un vieil adage du forum des travestis, devenu depuis Troisième Sexe, est que « s’afficher, c’est militer ». Aujourd’hui, la communauté « T » est toujours une minorité invisible, parce que nous faisons le choix de ne pas nous montrer. Pourtant, lorsque l’on sort, lorsque l’on pointe le bout de son nez dehors, on se rend compte que le monde extérieur n’est pas hostile ni effrayant, il est plutôt indifférent et prêt à accepter toutes les différences. D’autres minorités avant nous, victimes de violentes discriminations, n’ont pas eu ce choix : elles ont vécu dignement, contre vents et marées, compte tenu de leurs couleurs de peau, de leur poids ou de leurs origines, jusqu’à l’acceptation. Pourquoi nous, transgenres, vivrions-nous reclus, cachés et dans le secret ? Est-ce le meilleur choix que nous ayons à proposer à nos successeurs ?

Choisir c’est être soi-même

Le plus important est de ne pas laisser nos choix aux autres. C’est, après tout, notre moyen d’expression, d’action et d’existence en tant que personnes transgenres. Choisir, c’est agir dans un monde qui nous laisse maître de notre destin. Prendre un choix, c’est profiter de sa propre vie car si il y a des choix, il y a de la liberté. Saisissez-la !